Ce lundi 18 décembre, Amélie OUDÉA-CASTÉRA, ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, a présidé la 12ème séance plénière de l’Instance nationale du supportérisme (INS), qui se tenait dans le contexte particulier d’une recrudescence des actes violents à l’occasion des rencontres de football.
La séance a permis d’échanger sur le diagnostic de cette crise et sur les mesures prises et à prendre pour y répondre.
En effet, tout comme d’autres pays européens, la France fait face depuis plusieurs mois à une multiplication et une aggravation des actes violents lors des rencontres de football, comme l’a rappelé en séance la Division nationale de lutte contre le hooliganisme (DNLH) à l’appui de son bilan de la première partie de saison. S’agissant des seuls championnats professionnels, 8 épisodes de violences extrêmes ayant mis en danger la vie de plusieurs personnes, dont des supporters et un entraîneur, se sont produits depuis juin dernier, pour la majorité d’entre eux à l’intérieur des stades mais aussi, plus récemment, à l’extérieur des stades. Ces violences ont culminé avec la mort d’un supporter nantais, le 2 décembre 2023, dans le contexte d’une rixe impliquant un nombre important de supporters, comme l’a souligné le procureur de la République lorsqu’il s’est exprimé sur les premiers éléments de l’enquête.
En ouverture de l’INS, la ministre a donc souhaité revenir sur ce constat avec l’ensemble des acteurs du football présents, en soulignant que cette dégradation sans précédent des conditions de sécurité des rencontres appelait en réponse une action collective immédiate, ambitieuse et courageuse. Il s’agit en effet de faire cesser au plus vite ces agissements contraires à tout esprit sportif, qui mobilisent excessivement chaque semaine les forces de l’ordre sans parvenir aux résultats escomptés. Ainsi, avant même la moitié de saison, le nombre de policiers et gendarmes engagés lors des seules rencontres de Ligue 1 et Ligue 2 est passé de 9 496 en 2021/2022 à 13 989 en 2023/2024, soit une hausse de plus de 47 %. Il est désormais essentiel de revenir à une situation du football plus apaisée, moins consommatrice de forces de l’ordre et susceptible d’offrir de bien meilleures conditions à l’expression passionnée du supportérisme.
Le directeur général de la Ligue de football professionnel (LFP) a aussi partagé son analyse de la situation et présenté les perspectives envisagées, en lien avec les clubs. Les associations de supporters sont également intervenues pour exposer leur point de vue et réagir à ce constat.
La ministre est revenue sur l’ensemble des mesures mises en place depuis juin 2022, dans le cadre du dialogue permanent qu’elle a souhaité entretenir avec les représentants des supporters :
- en relançant l’INS et en réactivant ses groupes de travail pour renforcer la préparation des rencontres, mobiliser le réseau des référents supporters et policiers référents supporters visiteurs et améliorer les conditions de déplacement ;
- en renforçant l’individualisation et la proportionnalité des sanctions, au travers notamment de la loi du 19 mai 2023 relative aux Jeux Olympiques et Paralympiques qui a défini un meilleur régime des interdictions administratives et judiciaires de stade et encadré les obligations de pointage ;
- en travaillant à un recours plus encadré aux interdictions ministérielles de déplacement et au déploiement de l’expérimentation de la pyrotechnie, comme l’illustre la circulaire diffusée aux préfets le 13 octobre 2023.
Compte tenu de la situation actuelle, la ministre a rappelé à l’ensemble des participants que sa première impulsion, en concertation avec le ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer Gérald DARMANIN et le président de la LFP Vincent LABRUNE, a consisté à appeler jusqu’à l’échange d’aujourd’hui à un « moratoire » des déplacements pour les rencontres présentant des risques. Cette mesure vise à prévenir à court terme tout nouvel incident grave en lien avec ces rencontres, qui serait susceptible de remettre en question la pérennité des championnats.
Cette impulsion dans un contexte marqué par la gravité et l’urgence, qui a donné de premiers résultats demandant à être confirmés à moyen terme, offre en outre un temps de prise de recul nécessaire à une réflexion collective pour lancer une initiative plus globale. Cette initiative sera portée par l’État au tout début de l’année 2024 avec l’ensemble des acteurs du football : les supporters, les clubs, la Fédération française de football (FFF), la LFP, les représentants des joueurs, entraîneurs et arbitres ainsi que les élus. La ministre reviendra rapidement sur le calendrier de cette initiative et les mesures qui seront portées dans ce cadre, en lien avec le ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer et le Garde des Sceaux, Éric DUPOND-MORETTI.
La séance plénière a également permis de présenter un premier bilan de l’action des acteurs sportifs en matière de lutte contre les discriminations, notamment celles à caractère homophobe, compte tenu là aussi d’une résurgence de ces actes depuis le début de la saison 2023/2024.
La séance plénière a ainsi été l’occasion de revenir sur l’action des clubs et des instances en la matière, faisant notamment suite au courrier du 12 octobre que la ministre Amélie OUDÉA-CASTÉRA a cosigné avec Bérangère COUILLARD, ministre de l'Egalité et de la Lutte contre les discriminations, et les présidents de la FFF et de la LFP, Philippe DIALLO et Vincent LABRUNE.
Ainsi, le directeur général de la FFF a présenté les mesures concrètes de lutte contre l’homophobie et les autres formes de discriminations qui résultent du Plan d’Engagement adopté par la fédération, ainsi que les moyens humains et financiers mobilisés pour déployer ce plan au sein des plus de 14 000 clubs amateurs. Il a également annoncé la création au sein de la FFF, dans les prochaines semaines, d’une commission de lutte contre les discriminations sur le modèle de la CADET de la Fédération française de rugby, conformément au souhait formulé par la ministre le 17 mai 2023 lors de la présentation de son plan d’action pour mettre fin aux violences anti-LGBT+ dans le sport.
S’agissant du secteur professionnel, la LFP est revenue sur le bilan et le développement des ateliers de sensibilisation au bénéfice de tous les acteurs du football, qu’elle déploie au sein des clubs et centres de formation en s’appuyant sur plusieurs partenaires associatifs spécialisés en la matière. En complément, la directrice générale du FC Metz est intervenue pour présenter les actions conduites depuis l’automne par le club, en lien avec des associations locales de lutte contre les actes homophobes et les autres discriminations, ainsi que les premiers résultats du dialogue engagé avec ses groupes de supporters. Elle est également revenue sur l’action de sensibilisation à la lutte contre l'homophobie dans le football, suivie par l’un des joueurs du club, lequel avait été sanctionné à la suite de propos à caractère homophobe pour lesquels il avait rapidement exprimé ses excuses et regrets. De telles mesures éducatives, alternatives ou complémentaires à une suspension, permettent ainsi d’engager les acteurs du jeu dans une démarche pédagogique et aux effets bénéfiques sur le long terme.
Les échanges ont également permis de démontrer l’intérêt, d’ici la fin de saison 2023/2024, de réaliser un bilan partagé entre la LFP et les procureurs référents du sport s’agissant des faits de discriminations signalés, pour bien suivre leur traitement sur le plan disciplinaire et pénal.
Au-delà de ces premières mesures, la ministre a invité les participants à poursuivre leur mobilisation pour traduire les engagements pris en matière de lutte contre le fléau de l’homophobie et des discriminations dans le football :
- organiser des temps d’échanges avec les groupes de supporters, à l’instar de celui que la ministre avait eu le 13 octobre avec les membres de l’Association nationale des supporters (ANS), pour partager la nécessité, lorsque cela est nécessaire, de faire évoluer certaines pratiques, à commencer par les chants avec un contenu pour partie manifestement homophobe ;
- désigner, au sein des groupes de supporters, de personnes référentes en matière de prévention des discriminations, notamment homophobes, et prêtes à travailler sur cette thématique en lien avec des associations locales, en particulier les centres LGBT+ ;
- sur la base de ce lien entre référents et associations locales, renforcer l’observation des faits en tribunes, notamment par les officiels et délégués, en vue de mieux relever les éventuels propos discriminatoires et de systématiser les sanctions prises en réponse.
La ministre a donc appelé les instances et les clubs membres de l’INS à la multiplication de telles initiatives, qui démontrent la capacité des joueurs et supporters à interroger le caractère obsolète ou inapproprié de certains propos ou chants à contenu homophobe, tout comme la volonté des clubs de se mobiliser aux côtés de partenaires associatifs pour prévenir les dérives verbales sur le terrain et dans les tribunes, et les sanctionner systématiquement le cas échéant.
Enfin, cette séance plénière a été l’occasion d’annoncer les dispositifs qui seront mis en place pour promouvoir la mobilisation et l’expression des supporters à l’occasion des Jeux Olympiques et Paralympiques.
Les représentants de Paris 2024 et du Comité national olympique et sportifs français (CNOSF) ont ainsi présenté le programme « Allez les Bleus », qui vise à rassembler tous les supporters sous une même bannière pour accompagner les équipes de France et faire jouer à plein l’effet « Jeux à domicile », levier supplémentaire pour atteindre les objectifs fixés en termes de médailles.
Au travers de ce dispositif, le comité d’organisation et le CNOSF cherchent à créer un engouement collectif autour des équipes de France, dans l’ensemble des disciplines représentées aux Jeux, afin qu’à l’occasion des épreuves le maximum de supporters soient actifs en tribunes pour encourager et célébrer nos athlètes. Le programme prendra notamment la forme de carrés des supporters, déployés sur 1 000 sessions des Jeux Olympiques et Paralympiques, soit 280 000 places au total, avec 50 à 1 000 places par carré réservé aux supporters. De nombreuses animations seront en outre prévues pour accompagner cette mobilisation des supporters derrière les délégations françaises olympique et paralympique.
Les associations de supporters membres de l’INS ont été invitées à s’associer à ce dispositif, afin que l’ensemble des disciplines qu’ils représentent puissent bénéficier à plein du soutien et de l’engouement des supporters.
En conclusion, la ministre a indiqué qu’elle réunirait à nouveau les membres de l’INS au printemps 2024 pour réaliser le suivi des mesures engagées en faveur de l’apaisement des tensions à l’occasion des rencontres de football. Ce prochain rendez-vous permettra également de revenir sur l’avancée des actions de soutien du supportérisme dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques, mais aussi de l’Euro 2024 qui se tiendra en Allemagne et donnera lieu à une mobilisation en nombre des supporters français.