Par les nombreux documents collectés et les témoignages recueillis, la mission a pu reconstituer la chronologie des faits et examiner les informations dont la FFM, les conseillers techniques sportifs exerçant auprès de cette fédération et les services déconcentrés du ministère chargé des Sports avaient pu avoir connaissance.
La FFM a été informée dès janvier 2011 de cette affaire par le témoignage d’une des victimes qui a indiqué qu’elle allait porter plainte. La fédération a considéré qu’il convenait de privilégier la présomption d’innocence de l’entraineur, y compris après sa première condamnation en septembre 2015 dont le parquet a fait appel. En 2011 et jusqu’en 2018, la FFM n’a informé de ce témoignage ni la justice, ni l’administration centrale du ministère chargé des Sports ni ses services déconcentrés. Elle n’a pas non plus pris de mesures à l’encontre de l’entraineur, titulaire d’une licence, comme elle en avait le pouvoir.
Le règlement de la FFM l’engage pourtant, en tant que fédération agréée et délégataire et sous le contrôle du juge administratif, à initier des procédures disciplinaires à l’encontre de dirigeants, d’entraineurs ou de tout autre licencié auteurs d’infraction, et lui impose de veiller à ce qu’il n’y ait aucune atteinte à l’ordre public ou à la moralité publique. La FFM a par ailleurs la capacité, en tant que fédération agréée, de se constituer partie civile pour défendre les intérêts collectifs de ses licenciés et de ses clubs, ce qu’elle n’a pas fait dans le cas d’espèce. La mission considère donc que la FFM n’a pas exercé l’ensemble des responsabilités administratives qui lui incombent.
La structure que dirigeait cet entraineur a été intégrée au parcours d’excellence sportive de la FFM en février 2015, parcours validé par le ministère des Sports qui ignorait alors les poursuites judiciaires engagées à l’encontre de cet entraineur. Le ministère des Sports n’a découvert cette affaire qu’en décembre 2017 et a aussitôt suspendu cette structure de la filière d’accès au haut niveau.
Après la condamnation définitive de cet entraineur en décembre 2018, la FFM a retiré les labels qu’elle avait accordés à sa structure. Les services compétents du ministère des Sports lui ont également notifié son incapacité à exercer en tant qu’entraineur et il a dû restituer sa carte professionnelle d’éducateur sportif.
La mission de l’IGÉSR a mis en évidence l’existence d’un cloisonnement et d’un manque de circulation de l’information dans le traitement de cette affaire entre la FFM, des cadres techniques d’État exerçant auprès de cette fédération et les services déconcentrés et centraux du ministère.
La mission a également relevé, s’agissant de certains fonctionnaires, des manquements constitutifs de fautes disciplinaires qui justifieraient l’engagement de procédures disciplinaires à leur encontre.
En conclusion et aux termes des investigations, des faits susceptibles de recevoir une qualification pénale ayant été relevés par la mission, la cheffe de l’IGÉSR a informé les ministres qu’elle avait transmis le rapport au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris conformément à l’article 40 du code de procédure pénale.
Enfin, les inspecteurs généraux formulent des recommandations visant notamment à renforcer l’engagement des fédérations à prévenir et lutter contre les violences sexuelles, à mieux former les dirigeants, les éducateurs sportifs et les personnels relevant du ministère chargé des Sports ainsi qu’à systématiser l’échange d’information entre services.